Concert Liturgique de la chorale Armonia, Mars 2010, Québec

Par Dan Lazar Trifan


Éditeur de la version française : Gilles Levasseur (Québec)


Le 21 mars 2010, la basilique cathédrale Notre-Dame de Québec a été le théâtre d’une conférence sur les orphelins de Roumanie donnée par M. Marc Lepage, militant humanitaire et conférencier. La conférence peut être visionnée en version complète à l’adresse suivante :

(la conférence peut être visionné sur le site web de l’Église Catholique de Quebec ECDQ.TV ).

http://www.ecdq.tv/fr/videos/144a3f71a03ab7c4f46f9656608efdb2Nous y avons entendu un discours éloquent, agréable et honnête au sujet des différences culturelles. M. Lepage a fait part de son étonnement face à autant de contrastes qu’il a constatés et vécus en travaillant avec des enfants dans un orphelinat en Roumanie. Pour ne donner qu’un exemple, l’étonnement de M. Lepage provenait du fait que contrairement à ce à quoi il s’attendait, les enfants à qui on avait promis une sortie du dimanche à l’extérieur de l’orphelinat étaient vêtus de leurs plus beaux habits pour honorer l’invitation, un signe d’appréciation. « Les plus beaux », répétait Marc Lepage, qui a vu dans ce geste des enfants une autre échelle de valeurs, une appréciation différente de la personne, de l’événement, la relation humaine l’emportant sur l’aspect économique. Et il y a eu de nombreux autres exemples, a ajouté le conférencier, qui s’est impliqué pendant plusieurs années dans des missions humanitaires.

Pendant l’événement à la basilique, qui s’inscrit dans la série des Conférences Notre-Dame, la Chorale Armonia, de laMission orthodoxe roumaine Saints Apôtres Pierre et Paul de Québec, a offert, en première partie, un concert de chants liturgiques, de vieux chants roumains d’origine byzantine. L’hôte de l’événement était le père Denis Bélanger.

J’ai eu l’honneur et la satisfaction d’être l’un des membres de la chorale lors de ce concert. Nous étions un groupe de vrais amateurs, qui ont réalisé une performance exceptionnelle après seulement quelques mois de répétitions grâce à la grande compétence et au sens artistique de la chef de chœur Alina Ganescu-Ngo. Voilà un exemple éloquent de ce qu’un maître de talent peut faire. Peu importe — chez les membres de la chorale — les différences d’âge et de talent musical, le niveau de maîtrise de la musique et du chant : quand une synergie s’installe, un plus un peut faire davantage que deux. Dans notre cas, 7 plus 1 a donné une chorale originale et un concert mémorable ayant transmis beaucoup d’émotion au public présent dans la belle et impressionnante basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec.

Sur une note plus personnelle, lorsqu’on m’a invité à revenir à la chorale, je luttais pour sortir d’une période sombre, difficile et douloureuse, qui a tout changé, provoquant une véritable rupture dans ma vie. Jusque-là, j’étais convaincu que j’étais un homme trop fort pour être vaincu même par les plus dures et douloureuses provocations de la vie. Jusqu’à ce qu’on apprenne nos limites. Et quand les plus puissantes convictions personnelles sont anéanties, démolies, prouvées « non pratiques », d’un certain point de vue, il est difficile, douloureux, voire déchirant de se retrouver, de redéfinir son vrai soi-même. Ces quelques mois de pratique musicale pour interpréter quelques pièces liturgiques m’ont servi de premier point d’appui, de premier « jalon » sur le chemin du retour. Et ce processus a été possible, non pas en déplaçant mon attention et mes pensées sur autre chose, mais par l’acceptation émotionnelle de la situation, de la douleur, de la défaite. Bizarre, non? Une sorte de « construction émotionnelle » fondée sur les paroles et les tonalités de chants liturgiques byzantins, qui ont peut-être aussi été un moyen, une voie de communication m’ayant permis de toucher un certain état d’esprit spécifique, une certaine « présence » un peu plus profondément dans mon subconscient. Il me revient à l’esprit l’entrevue que j’ai accordée à Doina, et sa question (en 3e partie) touchant la capacité de la musique de nous rapprocher de la divinité. Une réponse pourrait être recherchée dans l’écoute de la musique que je décris ici, dans la tranquillité d’une de vos soirées tardives, en solitaire ou partagée avec votre bien-aimé(e)… Quand on peut, on peut s’abandonner à cette musique, se permettre de se laisser transporter dans une autre sorte de perception de l’esprit, des sentiments.

Finalement, comme l’a un jour dit l’un de mes fils : il n’y a pas d’amour et de haine, il n’y a que l’amour.

Je te souhaite une écoute agréable, à toi, visiteur improbable, incertain et incognito.


Voici un bref aperçu des pièces grâce à Mme Alina, qui en a fourni une présentation détaillée :

  1. Cuvine-se cu adevărat – Hymne à la Mère de Dieu

Le texte de ce chant a été utilisé maintes fois durant les siècles pour chanter la gloire de la Mère de Dieu, parCuvine-se_icon des compositeurs chrétiens orthodoxes, particulièrement par des moines orthodoxes du Mont Athos. Ce cantique, dont la deuxième partie est attribuée au Saint Roman Le Mélode (Ve siècle), fait partie des chansons les plus importantes utilisées dans la liturgie orthodoxe. La variante mélodique a été composée par Ion Popescu-Pasarea (1871-1943), qui fut professeur de musique byzantine au Séminaire de théologie de Bucarest.

« Il est digne en vérité de te célébrer, ô Mère de Dieu, bienheureuse et très-pure et Mère de notre Dieu. Toi plus vénérable que les chérubins et incomparablement plus glorieuse que les séraphins, qui sans corruption enfantas Dieu Le Verbe, Toi véritablement la Mère de Dieu nous te magnifions! »


  1. Iubite-voi Doamne – Je t’aimerai SeigneurIubite-voi_icon

Le texte de cette mélodie liturgique fait partie du 17e psaume du prophète David et est chanté durant la liturgie orthodoxe avant le Credo de Nicée-Constantinople. Cette variante musicale chorale a été composée à partir de l’ancien chant traditionnel byzantin de ce texte, par le compositeur Nicolae Lungu en 1957.

« Je t’aimerai Seigneur, ma force : le Seigneur est mon ferme appui, mon refuge et mon libérateur. »


  1. Marturisiti-va Domnului – Rendez grâce au SeigneurMarturisiti-va_icon

Les psaumes du prophète David reviennent de nouveau dans la mélodie byzantine Rendez grâce au Seigneur, plus exactement le psaume 135. Cette chanson roumaine de type byzantin n’utilise que neuf versets dont la plupart se réfèrent à la puissance de Dieu dans la Création.

         « 01 Rendez grâce au Seigneur : il est bon, éternel est son amour!

            02 Rendez grâce au Dieu des dieux, éternel est son amour!»


  1. Heruvic la Sambata Mare – Hymne des chérubins du Samedi Saint avant Pâques

Cet « Hymne des chérubins » est spécialement chanté dans le cadre liturgique uniquement le matin du Samedi Saint avant Pâques. Heruvic_iconLa chanson byzantine a pour origine le mont Athos, mais le compositeur nous est inconnu. Il décrit le monde pétrifié devant le supplice de Jésus Christ sur la croix. Il n’y a pas trop de paroles dans ce chant, car les paroles n’ont pas leur place dans un tel moment. La voix d’Alina vient comme d’un autre mode, d’un autre univers, sur une ligne mélodique spécifiquement byzantine, elle permet à la musique de pénétrer des profondeurs émotionnelles que nous n’avons jamais su ni même soupçonné avoir.

« Que tout corps humain se tait et qu’il soit en crainte et tremblant, et à rien de terrien n’y même y penser, car le Roi des rois et Seigneur des seigneurs va se tuer pour nourrir ses fidèles. »


  1. Tatăl nostru – Notre Père qui est aux cieuxTatal_nostru_icon

La dernière mélodie religieuse est composée sur le texte : « Notre Père qui est au cieux », qui est la prière la plus connue de la religion chrétienne. Il est récité par les orthodoxes et les catholiques à chaque messe, par les protestants luthériens et reformés à chaque culte.

« Notre Père, qui est aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour, pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés, et ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du mal. »


Quelques mots sur la communauté roumaine de la ville de Québec et sa chorale :

La chorale Armonia a vu le jour en octobre 2005 à l’intérieur de la Mission orthodoxe roumaine « Saints Apôtres Pierre et Paul » de Québec. Le répertoire de la chorale comprend des chansons religieuses, des cantiques de Noël ou de Pâques, des chansons de la musicographie chorale roumaine et internationale ainsi que du folklore roumain. Dans la pure tradition roumaine, pendant les fêtes de Noël, la chorale visite les Roumains de la région de Québec pour leur chanter des cantiques de Noël.

La communauté roumaine de la région de Québec est forte d’environ 1 000 personnes. La première vague d’immigration roumaine dans la région s’est produite dans les années 1980 et la deuxième au milieu des années 1990, après la chute du régime communiste en 1989. Elle continue paisiblement depuis 2000. Les Québécois d’origine roumaine sont organisés autour de deux organismes très actifs : la Mission orthodoxe roumaine « Saints Apôtres Pierre et Paul » (fondée en 2001) et l’organisation laïque CRQ-Communauté Roumaine de Québec (créée en 2003, voir www.roquebec.com).

La Communauté a sa propre église orthodoxe. (voir www.petrusipavel.org)